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Le défaut de l'avantage fiscal de l'épargne-pension coûte cher

La manière de calculer la réduction d'impôt de l'épargne-pension fait perdre 85 millions d'euros par an aux épargnants au profit des banques et assureurs, selon le cdH, qui propose de modifier l'imputation des frais.
©iStock

Faut-il modifier la façon dont l'avantage fiscal de l'épargne-pension s'applique? C'est ce que souhaite le cdH, qui propose que les frais des banques et des compagnies d'assurances soient séparés du montant sur lequel on calcule la réduction d'impôt.

Actuellement, l'avantage fiscal de l'épargne-pension - une réduction d'impôt égale à 25% ou 30% du montant annuel investi - est calculé sur le montant brut versé par l'épargnant et les frais d'entrée prélevés par les banques et les compagnies d'assurances sont ensuite déduits, ce qui implique que le montant net qui intègre effectivement ce troisième pilier des pensions est réduit.

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> Notre édito Simplicité versus équité

Autrement dit, la loi encourage les particuliers à épargner, chaque année, un maximum de 980 euros - réduction d'impôt de 30% à la clé - ou de 1.260 euros - avec une ristourne fiscale de 25% - mais une partie de ces montants versés finit dans les caisses des institutions financières.

Pour le cdH, il faut modifier ce mode de calcul. "Nous souhaitons mettre un terme à cette forme de préemption" exercée par les banques et les assureurs, nous explique un porte-parole du parti.

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Jusqu'à cinq milliards perdus

Le député Benoît Dispa a interrogé le ministre des Finances à ce sujet le 13 février. D'après les calculs du parlementaire humaniste, les Belges qui cotisent à une épargne-pension perdent chaque année 85 millions d'euros au profit des institutions financières à cause de la manière dont la réduction d'impôt et les frais s'articulent.
"La plupart des banques ou entreprises d'assurances prélèvent des droits d'entrée, généralement de 3%, explique-t-il. Je ne conteste pas le principe de ces droits d'entrée mais plutôt le fait qu'ils soient déduits du montant effectivement versé. En effet, si le souscripteur paye 980 euros, ce ne sont pas 980 euros qui sont versés dans son fonds d'épargne-pension, mais 980 euros moins les 3%, soit 950,60 euros."

7%
Certains contrats d’épargne-pension sous forme d’assurance-vie comportent des frais d’entrée allant jusqu’à 7%, mais il est possible de négocier avec les compagnies pour les réduire fortement.

Ces 29,40 euros de différence sont à multiplier par le nombre de comptes d'épargne-pension. On estime qu'il existe 1,6 million de fonds d'épargne-pension et 1,3 million d'assurances d'épargne-pension. "Le montant globalement perdu par les investisseurs s'élèverait donc à 85,3 millions d'euros par an", conclut Benoît Dispa.

Selon lui, sur une trentaine d'années de cotisations dans l'épargne-pension, la perte monte même à plus de 5 milliards d'euros en tout, sachant que la valeur de l'ensemble des capitaux constitués, quelle que soit leur date de versement, sera, en moyenne, multipliée au moins par deux sur toute la durée de l'épargne-pension.

Plus de 25 millions captés

Pour le député, il n'est pas normal que l'État intervienne à cet égard. En effet, sur les montants prélevés par les institutions financières, une réduction d'impôt est octroyée aux particuliers. En appliquant le taux de 30% aux 85 millions d'euros qui sont prélevés chaque année par les banques et assureurs sur les versements dans l'épargne-pension, on aboutit à des réductions d'impôts de 25,5 millions d'euros, un avantage fiscal capté par les institutions financières.

La solution? Pour Benoît Dispa, il faudrait arrêter d'imputer les frais d'entrée sur le montant légalement versé dans l'épargne-pension. "De cette manière, en effet, tous les souscripteurs versant 980 euros auront effectivement 980 euros investis dans leur compte, quel que soit le montant des droits d'entrée puisque ceux-ci seront réglés en dehors de ce versement", détaille-t-il.

Revers de la médaille: pour les particuliers, le montant total à débourser, frais compris, atteindra 1.009,40 euros en cas de droits d'entrée de 3%; mais au moins, l'avantage fiscal profitera uniquement aux épargnants et plus aux institutions financières.

Febelfin prêt à discuter

Du côté des banques, on se dit ouvert à cette proposition. "Nous sommes prêts à en discuter", indique Rodolphe de Pierpont, porte-parole de Febelfin, la fédération financière belge. "Mais la matière de l'épargne-pension est extrêmement technique et les frais sont liés à la technicité des fonds d'épargne-pension", avertit-il.

Dans le mémorandum que Febelfin a publié en janvier en vue des prochaines élections, les banques réclament que l'épargne-pension soit "consolidée et simplifiée". Autrement dit, "on plaide pour une extension" de l'avantage fiscal, explique Rodolphe de Pierpont. Concrètement, les banques verraient d'un bon oeil le retour à un seul plafond annuel pour les versements, avec "un alignement à 1.200 euros, par exemple, ce qui aurait du sens, estime le porte-parole de Febelfin. Chacun pourrait ainsi mettre jusqu'à 100 euros par mois de côté."

Du côté des assureurs, on craint une complexification de l'épargne-pension. "L'ajout d'un deuxième plafond a déjà rendu le produit plus compliqué, rappelle François de Clippele, porte-parole d'Assuralia. Cette proposition de compter les frais séparément ne risque-t-elle pas de compliquer encore les choses? Par contre, si cela s'accompagne d'un retour à un seul plafond, nous applaudirions des deux mains." Reste à voir si le prochain gouvernement fédéral décidera d'ouvrir ce nouveau chantier fiscal.

Frais d'entrée très divers sur le marché de l'épargne-pension

Parmi les différents produits d’épargne-pension proposés par les banques et les compagnies d’assurances en Belgique, les frais d’entrée sont très variables d’une institution à l’autre.

D’après les données recensées par le site de comparaison de placements financiers guide-epargne.be, la plupart des fonds d’épargne-pension facturent des frais d’entrée de 3%. C’est par exemple le cas du Star Fund proposé par ING ou encore du Metropolitan Rentastro disponible chez Fintro.

Les fonds d’épargne-pension de Crelan et KBC appliquent des droits d’entrée de 2%.

Les fonds Belfius Pension fund balanced plus et Arpe (Argenta) ne comportent aucun frais d’entrée.

Du côté des produits d’assurances, les droits d’entrée peuvent monter jusqu’à 7% (P&V Ideal Capital) mais les courtiers et épargnants peuvent négocier avec les compagnies et réduire fortement ces frais. Guide-epargne.be propose ainsi des assurances d’épargne-pension de Bâloise où les droits d’entrée sont réduits à zéro.

Plusieurs contrats prévoient des frais compris entre 0,50% et 6%. L’épargnant doit encore s’informer au sujet d’autres prélèvements éventuels, notamment les frais de gestion pour certains fonds. Enfin, le rendement et le risque doivent évidemment aussi entrer en ligne de compte.

 

 

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