Faire table rase des droits de succession, un exercice délicat
Supprimer un impôt impopulaire pour le remplacer par une taxe unique: un projet louable qui risque de bouleverser la circulation de l’argent au sein des familles.
La disparition potentielle d’une taxe, c’est toujours un événement. D’autant plus lorsque cette taxe concerne les droits de succession, très impopulaires... D’abord, par le triste et délicat contexte dans lequel ils sont prélevés. Ensuite parce qu’ils sont perçus, à juste titre, comme le énième prélèvement fiscal sur un patrimoine qui représente le fruit d’une vie durant laquelle on l’a patiemment construit, préservé et tenté de faire fructifier. Pour le transmettre à ceux que l’on aime. Les aider. Leur donner des ailes.
Alors évidemment, lorsqu’il est question de faire disparaître cet "héritage" d’un temps où il avait davantage de vertus redistributives – aujourd’hui atténuées par les différentes exonérations et possibilités de contournement –, les visages s’éclairent, et on applaudit des deux mains. Avec un certain soulagement et un sentiment de justice.
Pourtant, lorsqu’on ébranle solidement un édifice fiscal ou qu’on envisage d’en faire carrément table rase, il ne faut pas perdre de vue qu’il fait partie d’une construction globale dont les mécanismes ont aussi été pensés avec des objectifs louables.
Avec le changement qui se profile, nous serons sans doute plus enclins à conserver davantage d’argent jusqu’en fin de vie.
Des équilibres modifiés
Supprimer les droits de succession pour les remplacer par une taxe unique sur la transmission de capital à toutes les étapes de la vie, comme l’envisage la probable future coalition wallonne, est susceptible de bouleverser la circulation de l’argent au sein des familles comme au niveau budgétaire.
De rebattre les choix et arbitrages. Si les héritiers réservataires (conjoint, enfants) sont assurés par la loi de conserver leur dû, avantager un neveu, un cousin éloigné ou une bonne œuvre ne nécessitera plus les mêmes savants calculs ni états d’âme fiscaux… Les comportements pourraient changer.
Le taux prohibitif des droits de succession incitait à faire des donations de son vivant, à un tarif bien plus avantageux et en ayant le plaisir de voir ses proches en profiter. Avec le changement qui se profile, nous serons sans doute plus enclins à conserver davantage d’argent jusqu’en fin de vie.
C’est non seulement le cycle de vie de l’argent dans les familles, mais aussi dans le budget de la Région, qui s’en trouvera sensiblement modifié. L’exercice ne sera pas aussi simple qu’il y parait. Gageons que les experts ne tarderont pas à dégainer leurs arguments pour guider et accompagner ces réformes.
En tout état de cause, avant de toucher à ce morceau non négligeable de notre fiscalité, il s'agira d'en mesurer pleinement les importantes conséquences.
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