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Parce que tous les David, ensemble, peuvent faire plier Goliath

Serge Quoidbach

La révolution de la durabilité n'est plus un débat. Tous les acteurs, du simple citoyen aux groupes internationaux, doivent agir dans le même sens.

"Une révolution est en train de se préparer, et toute la question est de savoir comment y répondre." Cette phrase vient d'un discours, devenu célèbre, d’Emmanuel Faber, alors patron omnipotent de Danone, au Consumer Goods Forum à Berlin en 2017. Faber observait les changements de comportements de ses consommateurs. Son constat ne débouchait plus sur un paternaliste "notre entreprise doit pouvoir changer les choses", mais sur un "ils ne nous laissent plus le choix".

Comment faire pour que notre développement marche au rythme d'une histoire qui, si elle ne s'écrit pas, signera la fin de notre civilisation, rien de moins?

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"Lorsque nous parlons de développement durable, continue-t-il, nous parlons en réalité de notre droit à opérer dans le futur. Mais quand les gens pensent à leur souveraineté alimentaire, ils revendiquent leurs propres droits." Droit à manger sain, droit à préserver leur environnement, droit à vivre dignement. C'est la sainte trinité de la durabilité. Les entreprises ne peuvent plus la fouler du pied, nous dit Faber, il en va de leur survie. Pourtant, ce triptyque est délicat, fragile, en équilibre instable. Quatre ans après son discours, la rock star de Danone s'est faite renverser par son conseil d'administration.

Le discours et l'éviction d'Emmanuel Faber nous interpellent doublement.

D'abord parce que, selon les chiffres de la Harvard Business School que nous avons étudiés pour ce magazine, le Danone de Faber n'a pas, ces dernières années, généré moins d'impacts environnementaux que ses concurrents, malgré son beau discours. Il n'est pas le seul dans cette contradiction. Ces mêmes chiffres écorchent un autre champion de l'éthique, bien belge celui-ci: Solvay, conscient qu'il lui reste encore du chemin à parcourir.

Ensuite – et ceci découle de ce qui précède – parce que ce discours pose la bonne question: comment répondre à la révolution en cours? Comment s'assurer que notre système économique intègre cette impérieuse durabilité que réclament à cor et à cri les citoyens de ce monde, la faune et la flore, notre planète? Comment faire pour que notre développement marche au rythme d'une histoire qui, si elle ne s'écrit pas, signera la fin de notre civilisation, rien de moins?

La transparence

Le premier point – les beaux discours face à la réalité des chiffres – nous livre un élément de réponse: la transparence. Le terme "durabilité" ne peut plus être confisqué par quelques agiles PR d'entreprises. Une activité commerciale doit être comptable de ses actes, bien au-delà de sa simple prescription financière. C'est ce vide que tentent de remplir les chiffres de la Harvard Business School, évoqués ci-dessus. La crise des années 1930 a créé un bond en avant en termes de transparence pour les investisseurs, cette crise-ci devrait faire de même pour les citoyens, en imposant un standard équivalent qui inscrit le durable au sein même des bilans annuels et assemblées générales des entreprises. Une condition pour qu'entreprises, actionnaires et citoyens du monde puissent enfin se regarder droit dans les yeux.

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Le deuxième point – comment imposer la durabilité dans notre système économique – exige une convergence de trois leviers: financier, politique et technologique. Comme nous le rappelle Bill Gates dans son récent livre "Climat: comment éviter un désastre", "il faut que nous les tirions tous les trois en même temps et dans la même direction". Postulat qui est à l'origine de ce magazine. Il en présente dix exemples: des financiers à impact comme Thierry Déau ou Ronald Cohen, aux entreprises en réflexion comme les cafés Illy ou l'entreprise vestimentaire Patagonia, en passant par l'initiative folle de Bo Asmus Kjeldgaard, celui qui a mis Copenhague sur les rails de la neutralité carbone.

Et si ces modèles peuvent créer l'alchimie de la durabilité, le citoyen peut lui aussi faire plier les géants. L'ordonnance récente d’un tribunal néerlandais, saisi par une poignée d'ONG, exigeant de Royal Dutch Shell qu'il se désengage de moitié des énergies fossiles d'ici 2030 en est un exemple magnifique. Quelques David faisant plier Goliath. Elle est aussi là, la réponse que cherchait Emmanuel Faber.

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