Comment la valorisation de Tesla a fondu de 700 milliards de dollars en un an

Elle était encore la 6e plus grande entreprise mondiale par capitalisation boursière au début de l'année, elle n'est désormais plus qu'à la 20e place de ce classement. Tesla

, géant du véhicule électrique aux mains d'Elon Musk, a vu son cours dégringoler de près de 70% en 2022, parmi les pires performances de l'indice S&P 500, faisant s'évaporer 700 milliards de dollars de valeur depuis le 1er janvier.

En décembre, la chute s'est encore accélérée, les actions de la société s'effondrant de 40% au cours du pire mois de son histoire boursière. Son rebond, avec une hausse de quelque 7 % ce jeudi, offre un peu de répit, après sept séances consécutives de fortes baisses, dont une chute de plus de 11% sur la seule journée de mardi. Plus de 40 milliards de dollars s'étaient alors envolés en l'espace de quelques heures, ce jour-là.

Symbole de ce repli, la fortune d'Elon Musk a été quasi divisée par trois depuis novembre 2021, retombant à 130 milliards de dollars, selon l'indice Bloomberg des milliardaires, et rendant le titre d'homme le plus riche au monde à Bernard Arnault, PDG du groupe LVMH, qui est par ailleurs repassé au-dessus de Tesla en termes de valorisation, tout comme ExxonMobil, Visa, JPMorgan ou encore Walmart.

La fin du conte de fées?

"On dirait que la confiance a disparu et que le conte de fées Tesla a soudainement pris fin, constate Ipek Ozkardeskaya, analyste chez Swissquote. Les investisseurs sont très pressés de voir comment la récession qui se profile va affecter la demande et comment la concurrence des autres constructeurs de véhicules électriques va impacter la part de marché de Tesla."

Mardi, des éléments peu rassurants sont venus apporter une ébauche de réponse à ces questions. Selon un document interne que s'est procuré l'agence Reuters, Tesla envisage de réduire la production dans son usine de Shanghai en janvier. Celle-ci sera arrêtée plus d'une dizaine de jours autour du Nouvel An chinois contre seulement trois jours l'année dernière.

Les cas de covid qui explosent dans le pays ne seraient pas étrangers à cette décision qui devrait avoir un impact important, puisque, au cours des neuf premiers mois de l'année, l'usine de Shanghai a représenté plus de la moitié des véhicules produits par la marque.

Ce nouveau revers s'ajoute à une remise de 7.500 dollars accordée aux clients américains qui prendraient possession de leur Tesla avant la fin de l'année. Un effort vu par certains comme désespéré pour atteindre sa croissance prévue des ventes de 50% cette année, qui nécessiterait près de 500.000 livraisons ce trimestre, contre 343.000 seulement lors du dernier.

Musk, personnage plus que controversé

S'ajoutant aux problèmes commerciaux de l'entreprise, les frasques de son dirigeant Elon Musk sur Twitter n'ont fait que renforcer les inquiétudes des investisseurs. Alors que celui-ci avait déjà effrayé les actionnaires en vendant successivement des milliards de dollars de titres Tesla pour financer le rachat du réseau social, il y a multiplié les interventions controversées et les publications douteuses.

Dernière en date: une réponse saluant un "fil épique" de tweets publié par Dmitri Medvedev, vice-président du Conseil de sécurité de la Fédération de Russie et ancien président du pays, qui y listait une série de prévisions hypothétiques pour 2023, de l'effondrement de l'Union européenne et la création d'un Quatrième Reich, à la fin du FMI et l'éclatement d'une guerre civile aux États-Unis.

Quelques heures plus tard, Musk s'est trouvé contraint d'expliquer que ces prévisions étaient "les plus absurdes" qu'il ait jamais entendues, ce qui ne l'a pas empêché de renchérir ensuite avec d'autres tweets critiquant vivement les médias, vantant les mérites de Twitter comme une plateforme défendant la liberté d'expression.

Le lendemain, il clamait sur le réseau social qu'il n'était pas brainwashed (endoctriné), accompagnant ses déclarations d'une image dénigrant tour à tour les personnes vaccinées, de gauche, féministes, issues de la communauté LGBT ou encore musulmanes, face à un personnage s'affichant avec un drapeau américain.

L'optimisme des brokers

La chute impressionnante dont est victime l'action Tesla suite à ces multiples problèmes ne semble cependant pas inquiéter beaucoup d'analystes. Selon les données compilées par Bloomberg, 25 sur 44 d'entre eux sont toujours à l'achat sur le titre, et 14 recommandent de le maintenir. Le prix cible moyen représente un potentiel de hausse de 132% par rapport à la clôture de mardi.

Le ratio cours sur bénéfice de la société, qui est tombé à un niveau plus raisonnable de 33 contre 250 au début de l'année, soit une valorisation qui se rapproche de la moyenne de 18 dans le S&P 500 et 42 au sein du Nasdaq, semble aussi jouer en faveur d'une prise de position, d'après certains brokers. Baird, Piper Sandler ou encore Deutsche Bank sont autant de noms qui ont réitéré leur conseil d'achat ces derniers jours, plusieurs d'entre eux estimant que le creux pourrait être passé, malgré la volatilité du titre.