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Le brouillard s'épaissit sur l'exonération des panneaux photovoltaïques

©Photo News

Alors que c’est la ruée, en Wallonie, pour installer des panneaux avant la date clé du 1er juillet, la chute du gouvernement vient encore brouiller un peu plus les cartes sur une possible exonération du tarif prosumer.

Cloué au sol depuis une semaine, l’exécutif wallon MR-cdH cherche une porte de sortie pour finir tant bien que mal une partie de son travail législatif avant les élections du 26 mai. Le timing est évidemment serré. L’équipe du ministre-président Willy Borsus a tout au plus deux semaines pour faire voter certains des 30 textes qui restent à soumettre aux députés.

Depuis jeudi dernier, Willy Borsus a entamé les contacts avec l’opposition socialiste et Ecolo afin de tenter de dégager des majorités alternatives sur certains décrets. En parallèle, MR et cdH ont travaillé tout le week-end sur la priorisation de leurs demandes en vue de les soumettre à l’opposition ce mardi.

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"On n’entend pas lâcher ce texte. Il y a des marges de négociation avec l’opposition."

Parmi les textes "essentiels", il y a le fameux projet de décret prosumers. Cher aux libéraux, ce projet prévoit d’exonérer les quelque 150.000 ménages wallons propriétaires d’une installation photovoltaïque agréée avant le 1er juillet 2019 du futur tarif prosumer – un tarif qui devait entrer en vigueur le 1er janvier 2020, et leur faire payer les frais de réseau sur tous les kilowattheures réellement prélevés. Dont coût, pour une installation de 5 kWe: 334 à 447 euros par an, selon les premières estimations du régulateur wallon.

"On n’entend pas lâcher ce texte. La date du 1er juillet est toujours fixée. On va essayer de le faire passer. Il y a des marges de négociation avec l’opposition", insiste le cabinet du ministre de l’Énergie Jean-Luc Crucke qui rappelle que le gouvernement n’entend pas "quémander l’appoint des deux députés des listes Destexhe".

La partie est évidemment loin d’être gagnée. Le texte est actuellement soumis à l’avis du Conseil d’État. "Le ministre-président a pris des contacts avec le Conseil d’État pour faire passer certains textes en priorité", explique-t-on dans l’entourage de l’Elysette.

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"Nous avons toujours dit notre opposition au texte. On ne va pas changer d’attitude."

PS

Même si le texte revient rapidement du Conseil d’État, la marge de manœuvre est étroite. Tout dépendra de la position du PS, qui a clamé haut et fort tout le mal qu’il pensait de cette exonération. "Nous avons toujours dit notre opposition au texte. On ne va pas changer d’attitude", explique le PS.

Or, avec ses 5 voix en commission face aux 5 voix du MR-cdH depuis la défection d’une députée libérale, le PS est incontournable. "Mais si le texte est recalé en commission, la majorité peut néanmoins l’inscrire en plénière", nous indique-t-on. Là aussi, ce passage en plénière sera compliqué avec une majorité minoritaire qui sera obligée de composer avec l’opposition.

Incompréhensible

Tout ce flou législatif rend évidemment le contexte incompréhensible pour les ménages qui font le forcing chez les installateurs pour que leur installation soit placée avant l’échéance du 30 juin.

"Il n’y a, pour l’instant, aucun signe de panique ni d’annulation de commandes, remarque Alexis Vander Putten, administrateur délégué d’Energreen. Je crois que beaucoup de clients n’ont pas compris que le texte n’était passé qu’au gouvernement, et qu’il devait encore être approuvé par le Parlement: ils ont pris cette exonération pour acquise, ce qui a eu pour effet une ruée sur le photovoltaïque en Wallonie. Nous sommes complets jusqu’à fin juin. Ceci dit, nos offres ont toujours inclus les deux scénarios, et nous insistons auprès de nos clients sur le fait qu’il faut faire un choix à long terme, en misant sur la qualité avant tout, plutôt que de miser sur des effets d’aubaine."

Chez Engie aussi, l’annonce de cette exonération a provoqué un rush: la demande d’offres pour des panneaux solaires était trois fois plus élevée en février 2019 qu’en février 2018, et 70% des demandes venaient de Wallonie. "Et les clients posent beaucoup de questions sur le cadre qui sera d’application ou pas en Wallonie", précise Anne-Sophie Hugé, porte-parole d’Engie Electrabel.

Rappelons encore que même si l’actuel gouvernement parvient à faire voter le texte in extremis avant les élections, toutes les incertitudes ne seront pas levées: il est en effet fort probable que le régulateur wallon, la Cwape, s’oppose à cette décision et introduise un recours pour atteinte à ses compétences tarifaires. Elle considère en effet que faire contribuer tous les consommateurs aux frais de réseau est une question d’équité.

micro-réseaux | Ils restent en suspens

L’avenir de deux autres textes importants dans l’énergie est incertain, maintenant que la coalition MR-cdH a perdu sa majorité au Parlement. Le décret qui entendait régler une fois pour toutes la bulle du photovoltaïque, d’abord: il devait être débattu en commission le jour où les travaux parlementaires wallons ont été suspendus.

Celui sur l’autoconsommation collective, ensuite: ce texte doit permettre la création de microréseaux virtuels – des communautés de petite taille qui pourront utiliser le réseau public, mais aussi des lignes directes ou des réseaux fermés professionnels, pour mutualiser leur production et leur consommation électrique.

On sait que le bourgmestre de Crisnée voulait profiter de cette nouvelle possibilité pour que la commune produise de l’électricité verte à destination de ses habitants. Le collège communal a en effet décidé que la commune, qui dispose déjà de panneaux photovoltaïques sur les toits de bâtiments publics, allait financer l’installation d’une éolienne, et mettre l’électricité verte à disposition des habitants et des entreprises locales à prix coûtant. Un projet qui devait voir le jour en 2021 ou 2020, pour peu que le décret soit voté sous cette législature. "C’est un texte capital, réagit le cabinet Crucke. Il a été déposé au Parlement, et nous allons le pousser au maximum."

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